Actualité bibliographique du mois de juin
Traitement du psoriasis modéré à sévère - Pauline Bataille et Emilie Sbidian
Thème : THERAPEUTIQUE
Titre : Traitement du psoriasis modéré à sévère
Le psoriasis cutané et articulaire, modéré à sévère, a un impact sévère sur la qualité de vie.
Problématique : Au cours de ses deux dernières décennies, la meilleurs compréhension de la physiopathologie du psoriasis a permis l’identification de nouvelles cibles thérapeutiques. Les nouveaux traitements systémiques à administration orale (apremilast, tofacitinib), et les biothérapies tels que les anti TNF alpha (etanercept, infliximab, adalimumab), les inhibiteurs de l’IL-12/23 (ustekinumab), de l’IL-23 (guselkumab, tildrakizumab, risankizumab) et de l’IL-17A (secukinumab, ixekizumab, brodalumab), ont été développés afin de proposer une prise en charge personnalisée et obtenir une rémission durable.
Quel est l’état actuel de la recherche concernant ses nouveaux traitements ?
Cette revue de la littérature et méta-analyse en réseau du satellite français du Cochrane Skin group a permis de comparer les unes contre les autres l’ensemble des molécules déjà commercialisées ou en cours de développement (phases 2 et 3) dans le psoriasis modéré à sévère. Etaient inclus jusqu’à fin décembre 2016, l’ensemble des essais randomisés des adultes atteints d’un psoriasis cutané modéré à sévère associé ou non à un rhumatisme psoriasique, recevant un traitement systémique ou une biothérapie.
Les critères de jugement principaux étaient la proportion de patients atteignant le PASI 90 entre le 3ème et le 4ème mois de traitement et les effets secondaires graves associés aux molécules étudiées.
Au total, 109 études étaient sélectionnées incluant 39 882 patients, âgés en moyenne de 44 ans avec un PASI moyen de 20 recevant une des 19 molécules sélectionnées ou le placebo (Figure 1 : Réseau).
La figure 1 met en évidence le réseau des molécules ayant fait l’objet d’essais randomisés dans le psoriasis ; la taille du rond était proportionnelle au nombre de patients inclus pour chacune des molécules, les traits représentaient les comparaisons directes entre les molécules et l’épaisseur du trait étaient proportionnel au nombre de comparaisons directes. Ainsi, la quasi-totalité des essais étaient réalisés versus placebo, très peu d’études étudiaient l’efficacité des molécules les unes par rapport aux autres.
La méthodologie employée permettait de comparer les molécules les unes par rapport aux autres même en l’absence de comparaisons directes pour les 2 critères de jugements principaux : le PASI 90 et les évènements secondaires graves. Ainsi, les résultats des comparaisons des traitements (pour lesquels la confiance dans la qualité des données scientifiques était modérée à élevée) 2 à 2 sont résumés dans la Figure 2: Comparaisons 2 à 2 des molécules pour lesquelles le niveau de confiance de la qualité des données scientifiques était modéré à élevé..
Dans la figure 2, chaque cellule contient le risque relatif (RR) et son intervalle de confiance à 95% pour les deux critères de jugements principaux : PASI 90 (triangle du bas) et effets indésirables graves (triangle du haut). Les RR supérieurs à 1 pour le triangle du bas et inférieurs à 1 pour le triangle du haut favorisent le traitement le plus à gauche. Les résultats significatifs sont surlignés en gris. τ (Tau): hétérogénéité estimé.
Ainsi, on notait une plus grande efficacité des biothérapies anti IL-17 et anti IL-23 par rapport aux autres molécules incluant les anti-TNF, les petites molécules et le méthotrexate.
Cette étude estimait également le meilleur rapport bénéfice (PASI90)/risque (survenue d’évènements indésirables graves) (Figure 3 : ranking plot).
Dans la figure 3, l'efficacité (axe x, PASI 90) et l'acceptabilité (axe y, effets indésirables graves) sont représentés pour chacune des molécules. Un traitement optimal est caractérisé à la fois par une efficacité élevée et une acceptabilité élevée, c'est-à-dire qu'il est situé dans le coin supérieur droit du graphique. Les traitements ayant une couleur identique sont considérés comme ayant rapport bénéfice/risque similaire. Les traitements soulignés présentaient un niveau de confiance dans la qualité des données scientifiques modéré à élevé.L’ustékinumab et le certolizumab présentait le meilleur rapport bénéfice-risque. Le secukinumab, l’ixekizumab, le brodalumab, le guselkumab, et l’adalimumab semblaient plus efficace mais bien moins bien tolérés.
Le methotrexate est le traitement présentant le taux le plus faible d’effets secondaires.
Les principales limites de cette étude étaient celles des essais thérapeutiques : une population sélectionnée et une évaluation à court terme (entre le 3 et 4ème mois de traitement).
Concernant le choix entre les différentes biothérapies, Smith et al. ont publié des recommandations anglaises en mai 2017.
Ils rappelaient d’une biothérapie ne pouvait être prescrite qu’après l’échec, l’intolérance ou la contre-indication au méthotrexate et à la ciclosporine. Cette restriction de prescription était initialement liée à l’absence de données de tolérance à long terme au moment de la commercialisation de ces molécules ainsi qu’à des considérations médico-économiques.
Le choix du traitement biologique doit tenir compte de la sévérité de la maladie, de la présence d’un rhumatisme psoriasique et de ses caractéristiques clinico-radiologiques, ainsi que du terrain du patient (âge, comorbidité, BMI, observance).
Ainsi, ils recommandaient
- l’ustekinumab en 1ère intention pour les patients atteints de psoriasis cutané; et discutaient également le secukinumab en première ligne
- l’adalimumab en 1ère intention pour les patients atteints de rhumatisme psoriasique, et discutaient également le secukinumab en première ligne
Le rapport bénéfice/risque de l’ustékinumab était souligné par la revue cochrane.
Le choix du secukinumab en première ligne était plus discutable : plus d’effets secondaires, pas de différence d’efficacité avec l’ixekizumab ou le brodalumab, ni avec le guselkumab.