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Actualité bibliographique du mois de juin

Revue de 3 études par Irène Gallais-Serezal et François Aubin (CHU de Besançon)

Actualité bibliographique du mois de juin

Les anti-IL17 n’induiraient pas de MICI de novo.

New-onset inflammatory bowel diseases among IL-17 inhibitor-treated patients: results from the case–control MISSIL study. Letarouilly JG, Pham T, Pierache A et al. Rheumatology 2021 Nov 3;keab819. doi: 10.1093/rheumatology/keab819.

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34730790/

Risk of Inflammatory Bowel Disease in Patients With Psoriasis and Psoriatic Arthritis/Ankylosing Spondylitis Initiating Interleukin-17 Inhibitors: A Nationwide Population-Based Study Using the French National Health Data System. Penso L, Bergqvist C, Meyer A, Herlemont P, Weill A, Zureik M, Dray-Spira R, Sbidian E.  Arthritis Rheumatol. 2022 Feb;74(2):244-252.

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34279061/

Dès 2012, le premier représentant de cette classe thérapeutique, le sécukinumab (anti-IL17A), a été testé dans la maladie de Crohn, l’axe IL23-IL17 étant impliqué dans la physiopathologie des MICI. Malheureusement, dans une étude preuve de concept, le placebo s’est avéré nettement supérieur au sécukinumab vis-à-vis de la réduction du score d’indice d'activité de la maladie de Crohn (1). Un constat identique a été observé avec le brodalumab (inhibiteur du récepteur A de l'IL17). La question s’est donc posée de savoir si les anti-IL17 étaient inducteurs de MICI ou tout simplement inefficaces vis-à-vis de ces pathologies. Une alerte de l’EMA a été émise en 2021 indiquant un risque potentiel de développer une MICI sous anti-IL17 (2). Plusieurs analyses de données poolées provenant d’essais cliniques randomisés ayant inclus des patients atteints de psoriasis, de rhumatisme psoriasique et de spondylarthrite axiale ont pour leur part conclu que les cas de MICI apparus de novo sous anti-IL17 étaient rares (3). Des études en vraie vie étaient nécessaires, d’autant que les prescriptions de sécukinumab ne cessaient d’augmenter en France selon l’Assurance-maladie. En 2018, c’était en effet la troisième biothérapie (sur sept) la plus prescrite (4).

Le registre national français (MISSIL) a colligé les MICI de novo de janvier 2016 à décembre 2019 chez les patients sous anti-IL17 (sécukinumab uniquement) dans les services de rhumatologie, dermatologie et gastroentérologie (5). Dans cette étude nationale en vraie vie, les cas de MICI apparus de novo sous anti-IL17 (c’est-à-dire sans signe digestif avant la mise en place du traitement) étaient peu fréquents : 31 cas répertoriés. Le délai médian d’apparition de nouveaux symptômes de MICI était de quatre mois (1,5 à 7,5). Dans MISSIL, après interruption du sécukinumab, l’évolution était favorable avec résolution complète de la MICI (17/31), amélioration (7/31) ou stabilisation (5/31). En parallèle, l’incidence des MICI de novo était faible et a diminué au fil du temps : elle est passée de 0,69/100 patients-années en 2016 à 0,08/100 patients-années en 2019. Ceci n’est pas en faveur d’un effet inducteur de MICI sous anti-IL17.

Plus récemment, une nouvelle étude française (6) réalisée à partir des données du SNDS a analysé 16,793 patients débutant un anti-IL17, 20,556 patients l’apremilast et 10,294 l’etanercept. Une MICI survenait chez 132 patients dont 72 sous anti-IL17 (0.43%), 11 sous apremilast (0.05%) et 49 sous etanercept (0.48%), majoritairement après 6 mois d’exposition. Le risque de développer une MICI était significativement supérieur pour les anti-IL17 versus l’apremilast et similaire pour l’etanercept.

Les anti-IL17, avec probablement un effet classe, ne semble pas être inducteur de MICI, mais il est prescrit à une population à risque de MICI. Ces biothérapies ne font probablement que démasquer une MICI infraclinique. Il existe des données sur une aggravation de l’inflammation intestinale en cas de neutralisation de l’IL-17 dans la colite expérimentale murine. En effet, l’IL-17 assure l’intégrité de la barrière intestinale. L’aggravation des MICI sous anti-IL17 pourrait être aussi liée à la prolifération de Candida albicans dans l’intestin induite par l’inhibition de l’IL-17 impliquée dans l’immunité antifongique. Au vu des données épidémiologiques précédentes, cette hypothèse est moins probable. L’autre hypothèse, plus probable, est une inefficacité des anti-IL17 à contrôler l’activité des MICI chez les patients ayant déjà une MICI infraclinique.

D’un point de vue pratique, les MICI de novo sous anti-IL17 restent une éventualité rare. D’ailleurs, pour conforter ces résultats, une méta-analyse antérieure de 14 390 patients traités par anti-IL17 dans les essais contrôlés randomisés n’a retrouvé aucune différence dans le risque de développer une MICI de novo, que ce soit dans la période d’induction ou de suivi (7). Cependant, nous devons rester vigilants et nous assurer, avant la mise sous anti-IL17, que les patients ne présentent pas de signes évocateurs, ni d’antécédents familiaux de MICI. Le dosage de la calprotectine fécale doit s’envisager assez facilement. La vigilance doit se maintenir tout au long du traitement même si ces cas de MICI de novo semblent survenir très rapidement.

Références :

  1. Hueber W, Sands BE, Lewitzky S et al.; Secukinumab in Crohn’s Disease Study Group. Secukinumab, a human anti-IL-17A monoclonal antibody, for moderate to severe Crohn’s disease: unexpected results of a randomised, double-blind placebo-controlled trial. Gut 2012;61: 1693–700.
    2. European Medicines Agency. Cosentyx. 2018. https:// www.ema.europa.eu/en/medicines/human/EPAR/ cosentyx
    3. Schreiber S, Colombel J-F, Feagan BG et al. Incidence rates of inflammatory bowel disease in patients with psoriasis, psoriatic arthritis and ankylosing spondylitis treated with secukinumab: a retrospective analysis of pooled data from 21 clinical trials. Ann Rheum Dis 2019; 78:473–9.
    4. Pina Vegas L, Sbidian E, Penso L, Claudepierre P. Epidemiologic study of patients with psoriatic arthritis in a real-world analysis: a cohort study of the French health insurance database. Rheumatology (Oxford) 2021;60: 1243–51.
    5. Letarouilly JG, Pham T, Pierache A et al. New-onset inflammatory bowel diseases among IL-17 inhibitor-treated patients: results from the case–control MISSIL study. Rheumatology 2021;00:1–8.
  2. Penso L, Bergqvist C, Meyer A, Herlemont P, Weill A, Zureik M, Dray-Spira R, Sbidian E. Risk of Inflammatory Bowel Disease in Patients With Psoriasis and Psoriatic Arthritis/Ankylosing Spondylitis Initiating Interleukin-17 Inhibitors: A Nationwide Population-Based Study Using the French National Health Data System. Arthritis Rheumatol. 2022 Feb;74(2):244-252.
  3. Burisch J, Eigner W, Schreiber S, et al. Risk for development of inflammatory bowel disease under inhibition of interleukin 17: A systematic review and meta-analysis. PLoS One 2020;15:e0233781.

Risque de candidose sous anti IL-17: étude observationnelle en vie réelle de sources multiples et indépendantes

Risk of candidiasis associated with interleukin-17 inhibitors: A real-world observational study of multiple independent sources. Davidson L, van den Reek JMPA, Bruno M, van Hunsel F, Herings RMC, Matzaraki V, Boahen CK, Kumar V, Groenewoud HMM, van de Veerdonk FL, Netea MG, de Jong EMGJ, Kullberg BJ. Lancet Reg Health Eur. 2021 Nov 22;13:100266. doi: 10.1016/j.lanepe.2021.100266. eCollection 2022 Feb.

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34950923/

https://reader.elsevier.com/reader/sd/pii/S2666776221002520?token=C7ED0D040DE380DA32B675663042970FAA3B2EF888B583F9EAC7E872912DF958C1ABB8334D6AC6AF59489960EDC334D9&originRegion=eu-west-1&originCreation=20220610090946

En utilisant les données de l’organisation mondiale de la santé, de l’agence européenne du médicament, du registre d’effets secondaires hollandais (PHARMO) et une cohorte hollandaise de 300 patients, les auteurs montrent que les anti IL-17 exposent les patients avec psoriasis à un sur-risque (ROR) de candidose entre 12 et 21, supérieur au ROR des anti-TNF, entre 4 et 10. Ces données regroupaient les candidose oesophagiennes, oro-pharyngiennes et cutanées. Au sein de la cohorte des 300 patients traités par biologiques, 58% des traitements par anti-IL17 étaient associés à une infection mycosique versus 34.5% pour les anti-IL12/23 et 15% pour les anti-TNF. Par ailleurs, les leucocytes des patients traités et ayant développé une candidose avaient une capacité fungicide inférieure aux contrôles sains.